En France, la réhabilitation respiratoire n’est pas suffisamment prescrite. Cette situation n’est pas exceptionnelle puisque les mêmes difficultés sont constatées au niveau européen.
Pourtant, l’OMS rappelle que 86 % des décès en Europe sont liés à des maladies chroniques, qui consomment 75 % des budgets de santé.
Selon le Dr Gilles Jebrak, pneumologue à l'hôpital Bichat, seul 10 % des patients BPCO ont une prescription de réhabilitation respiratoire. On est loin des recommandations de bonnes pratiques qui préconisent une prise en charge multidisciplinaire et éducative.
En région, on constate un déficit de prise en charge en soins de suite spécialisés sur l’hémi région Est. Cette situation s’explique par un taux d’équipement insuffisant, une démographie de spécialistes défavorable mais également par un développement des alternatives, notamment en hôpital de jour de médecine.
Evolution 1 : Une offre régionale inégalement répartie sur les territoires
La région des Pays de la Loire présente un taux d’équipement inférieur aux préconisations des SROS-PRS précédents, soit 1,28 contre 3 lits et places pour 100 000 habitants.
Ce résultat s’explique notamment par l’absence de mise en œuvre par les acteurs de deux implantations prévues au PRS précédent.
L’inégale répartition des implantations entraine des taux de recours très hétérogènes selon les territoires (figure 1). En effet, on constate une quasi absence de consommation de séjours en SSR spécialisés sur l’hémi région Est.
Sur cette partie du territoire, les patients sont pris en charge dans les unités de soins de suite polyvalents ou bénéficient de programme d’éduction thérapeutique réalisés en hôpital de jour de médecine.
Evolution 2 : Une majorité de prises en charge hors SSR spécialisés
Les patients faisant l’objet d’une prescription de réhabilitation respiratoire en sortie de court séjour sont majoritairement accueillis hors unités de SSR spécialisées.
Les statistiques issues de l’outil d’orientation ViaTrajectoire, au titre de l’année 2015, donnent les résultats suivants :
- Loire-Atlantique : 36 patients accueillis en unités spécialisées sur 124 prescriptions
- Maine et Loire : 3 patients accueillis en unités spécialisées (hors région) sur 57 prescriptions
- Mayenne : pas de patients accueillis en unités spécialisées faute de structures autorisées. 64 prescriptions.
- Sarthe : 3 patients accueillis en unités spécialisées (hors région) sur 74 prescriptions
- Vendée : 7 patients accueillis en unités spécialisées (hors région) sur 43 prescriptions
Toutefois, ces chiffres ne tiennent pas compte des entrées directes du domicile, qui représentent la majorité des admissions pour ce type de pathologie.
Evolution 3 : Des freins au développement exprimés par les usagers et les professionnels
Les freins à la prescription viennent des patients mais également des médecins. On peut citer :
- Un défaut de repérage des patients éligibles par les médecins généralistes, les pneumologues et les médecins de MPR (absence d’information et de formation à la prise en charge des maladies chroniques).
- Des structures souvent éloignées du domicile.
- Un manque de motivation et d’observance du patient (facteurs sociaux)
- Des rythmes et horaires incompatibles avec la vie professionnelle.
- Une difficulté de coordination des professionnels.
Un autre frein important semble être l’insuffisance de financement en dehors des structures hospitalières et des réseaux (organisation du 1er recours avec les médecins et kinésithérapeutes libéraux).
Evolution 4 : Un déficit de pneumologues
La région présente une densité de pneumologues très inférieure à la moyenne, soit 3 spécialistes pour 100.000 habitants contre 4,2 au niveau national (figure 4). Seule la Loire-Atlantique présente une densité proche de la moyenne, soit 3,8.
La situation s’est dégradée entre 2007 et 2016 puisque 4 départements sur 5 présentent une évolution négative de la densité médicale sur la spécialité (figure 4).
Problématique 1 : Les freins à la réhabilitation respiratoire
Les freins sont liés à la fois :
- Aux patients :
Manque de motivation, structures éloignées du domicile, défaut d’observance du traitement, difficulté à concilier le traitement et la vie professionnelle, …
Défaut d’information sur les objectifs et les modalités du traitement. - Aux médecins :
La réhabilitation est quelquefois prescrite trop tardivement.Les médecins ne sont pas suffisamment formés au repérage des patients, ni à la prise en charge des maladies chroniques.
Il est difficile de coordonner le suivi à long terme par l’ensemble des professionnels impliqués dans le traitement.
L’inventaire des ressources régionales n’est pas suffisamment connu des prescripteurs.
Problématique 2 : Le déficit de pneumologues
La densité régionale des pneumologues est très inférieure à la moyenne nationale.
Tous les territoires présentent une densité inférieure à la moyenne.
De 2007 à 2016, la situation s’est encore dégradée sur 4 territoires.
Problématique 3 : Le financement de la rééducation en SSR
Le cadre de financement de cette activité est trop restreint (DAF SSR).
Le développement des prises en charge en hôpital de jour se substitue au SSR pour des raisons essentiellement économiques.
L’impact du nouveau modèle tarifaire SSR n’est pas encore évalué.
Problématique : Le suivi des patients est difficile
Les ruptures de parcours sont fréquentes compte tenu notamment des facteurs sociaux (isolement, précarité, addictions, …).
Les projets de soins ne sont pas suffisamment élaborés et coordonnés avec l’ensemble des professionnels impliqués.
Proposition 1 : Lever les freins à la prescription
Accompagner la diffusion des recommandations de bonnes pratiques de la HAS et des sociétés savantes (guide parcours de soins, …).
Former les professionnels, et notamment les médecins généralistes, au repérage et à l’orientation des patients éligibles, notamment dans le cadre du Développement Professionnel Continu.
Adapter les composantes du programme aux contraintes du patient (mode de prise en charge, horaires, rythme, …).
Evaluer a priori les risques de mauvaise observance afin d’adapter les prescriptions et de favoriser l’adhésion à long terme.
Proposition 2 : Développer la diversité des modes de prise en charge
Réaliser un inventaire de l’offre disponible (lieux de prise en charge, dynamiques locales, …) afin de mieux corréler l’offre aux besoins. Il faut rappeler que l’efficacité de la réhabilitation respiratoire est équivalente quel que soit le lieu de réalisation (hôpital, structure de proximité, domicile, …).
Privilégier la réhabilitation respiratoire en ambulatoire ou au domicile quand l’état du patient le permet.
Développer les prises en charge dans les structures de proximité, et notamment dans les maisons et pôles de santé.
S’inspirer des expériences et des projets innovants déjà développés dans les autres régions.
Proposition 3 : Optimiser la coordination des professionnels
Améliorer la connaissance des ressources régionales en partageant l’information avec les prescripteurs et les professionnels impliqués (site internet, guichet unique, référent régional).
Organiser des formations pluri-professionnelles afin de modéliser des parcours de soins qui intègrent toutes les composantes de la réhabilitation.
Favoriser la mutualisation des plateaux techniques des établissements de santé de proximité avec les masseurs-kinésithérapeutes libéraux.
Proposition 4 : Améliorer le suivi des patients
Elaborer un projet de soins avec l’ensemble des professionnels (la planification en amont des consultations de suivi, diffusion des résultats du stage initial, …).
Développer les programmes d’éducation thérapeutique pour favoriser la responsabilisation du patient.
Développer l’utilisation de la télémédecine, de la télésurveillance et du suivi téléphonique.
Accompagner financièrement le développement des objets connectés.
Promouvoir la réhabilitation respiratoire au domicile afin de favoriser l’observance des traitements et d’éviter les ruptures de parcours.
Listes des implantations
Figure 1 : Productions des établissements et consommation des patients en 2015 (en nombre de patients)
Figure 2 : Densités des médecins spécialistes en pneumologie
Figure 3 : Variation de la densité des médecins spécialistes en pneumologie de 2007 à 2016
Figure 4 : Effectifs, Densité, Variation 2007-2016, proportion des modes d’exercice
- BEH - Bulletins épidémiologiques hebdomadaires
- L’apport des bases médico-administratives dans la surveillance des maladies respiratoires chroniques en France
- Développement de la surveillance des maladies respiratoires au Québec à partir des données médico-administratives
- HAS - Guide du parcours de soins - Bronchopneumopathie chronique obstructive
- HAS - Note méthodologique et de synthèse documentaire « Comment mettre en œuvre la réhabilitation respiratoire pour les patients ayant une bronchopneumopathie chronique obstructive »
- Atlas de la démographie médicale en France
- Revue des Maladies Respiratoires - Pourquoi la réhabilitation respiratoire est-elle si peu prescrite ? Comment y remédier ?
- Bases de données PMSI 2014-2015
- Statistique ViaTrajectoire